CONSEIL CAFE CACAO : pourquoi Yves Brahima Koné, patron du Café-cacao ivoirien, est sous pression et que certains exportateurs risquent la faillite

Certains exportateurs de Côte d’Ivoire pourraient faire faillite s’ils ne parvenaient pas à honorer leurs engagements auprès des acheteurs internationaux. Une situation due notamment à la mauvaise anticipation des volumes de fèves disponibles par le Conseil café cacao. En 2017, une crise similaire avait coûté son poste à sa patronne de l’époque

 

Une course contre la montre est engagée pour Yves Brahima Koné, directeur général du Conseil café cacao (CCC), le gendarme de la filière cacao. Comme en 2017, la Côte d’Ivoire, premier producteur mondial de fèves, pourrait voir certains de ses exportateurs ne pas être en mesure d’honorer tous les contrats d’approvisionnement en fèves de cacao qu’ils ont obtenus.

 

Réunion d’urgence

Le 10 février, Yves Brahima Koné a convoqué en urgence les principaux acteurs de ce marché à une réunion au siège du CCC pour étudier la situation. Étaient présents notamment Lionel Soulard, directeur général de Cargill et président du Gepex, le principal syndicat des multinationales, Germain Tété, représentant de l’entreprise Ivory Cocoa Products (ICP), Stéphane Apoque, directeur général du négociant ivoirien Kineden SA et Anthony Fortez, un vétéran du négoce de cacao. Mené par Yves Koné, cet échange a permis de mettre en évidence un manque de disponibilité de fèves de cacao pour les exportateurs équivalant à environ 120 000 tonnes pour la campagne principale 2022-2023 en cours (d’octobre à avril).

 

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Si tel était finalement le cas, l’État ivoirien perdrait plusieurs dizaines de milliards de francs CFA (10 milliard de francs CFA équivalent à près de 15,25 millions d’euros) de recettes fiscales et parafiscales. Surtout, certains opérateurs ivoiriens pourraient faire faillite, ces derniers devant payer des pénalités au CCC, mais aussi trouver un arrangement avec leurs clients ou leurs banques, qui ont avancé des fonds pour procéder aux achats de fèves. Yves Koné a adressé un compte rendu détaillé de la situation au gouvernement, qui suit son évolution avec beaucoup d’attention. Selon nos informations, plusieurs raisons expliquent ce qui ressemble de plus en plus à une nouvelle crise à venir pour la filière. Le CCC aurait notamment été trop optimiste dans sa capacité à tirer profit de la récolte en cours. Les volumes vendus au travers de contrats représentent en effet la quasi-intégralité de la production nationale.

 

Spéculation

Mais ce calcul ne tient pas suffisamment compte de la spéculation de certains acheteurs appelés traitants, qui stockent une partie des fèves collectées à l’intérieur du pays auprès des cacaoculteurs plutôt que de l’apporter aux ports de San Pedro et d’Abidjan. Surtout, une portion relativement importante de la production part en contrebande vers la Guinée et le Liberia, où les prix d’achat sont plus élevés. En 2021-2022, on estimait ce volume entre 20 000 et 30 000 tonnes. Il serait beaucoup plus important cette année. La brigade spécialisée qui patrouille le long de frontière n’arrive pas à juguler ce trafic. L’hypothèse de défauts sur les contrats d’exportation hante le patron du CCC. En 2017, la défaillance des opérateurs nationaux avait provoqué le limogeage de Massandjé Touré-Litsé, alors directrice générale du CCC. Un audit de KPMG avait estimé le coût de cet épisode à plus de 100 milliards de F CFA pour le gouvernement.

 

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Pour trouver les volumes manquants, Yves Koné pourrait proposer aux acheteurs de fèves ivoiriennes non servis de patienter jusqu’à la campagne intermédiaire, qui démarre en avril. Les volumes manquants seraient alors pris sur la quote-part des transformateurs locaux (broyeurs). Les multinationales qui dominent le marché d’achat de fèves ne sont pas concernées par ces difficultés. Cargill a franchi le seuil des 250 000 tonnes de fèves de cacao achetées entre octobre dernier et mi-février. Le Suisse Barry Callebaut, via sa filiale Saco, a quant à lui sécurisé un approvisionnement de 190 000 tonnes. Le podium des exportateurs est complété par l’indo-singapourien Outspan (175 000 tonnes), devant le français Touton (100 000 tonnes). L’ensemble des multinationales captent environ 80 % des fèves ivoiriennes. La production de la grande campagne cacao, qui a débuté en octobre 2022, est estimée à 1,655 million de tonnes, en hausse de 55 000 tonnes par rapport à l’année dernière.

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